Source : Infosuicides –
https://www.infosuicide.org/guide/la-crise-suicidaire/levaluation-du-potentiel-suicidaire/

L’évaluation du potentiel suicidaire

Lorsque des intentions suicidaires sont dépistées chez une personne en crise, il est nécessaire d’évaluer la gravité de la crise avant d’établir un plan d’intervention.

Au cours de l’évaluation du potentiel suicidaire, le clinicien s’intéresse à l’évaluation du risque suicidaire (facteurs prédisposant à l’apparition du geste, de l’urgence du passage à l’acte (imminence de la conduite suicidaire), et du danger entraîné par le scénario suicidaire (létalité du moyen).

La clé d’une évaluation adéquate se trouve dans la formation des intervenants. Les crises suicidaires, malgré qu’elles soient de durée limitée, peuvent être récurrentes.

Évaluation du risque suicidaire, de l’urgence et de la dangerosité :

Cette étape consiste à évaluer le degré de perturbation de l’individu afin de déterminer l’imminence et la dangerosité du geste suicidaire.

La tâche pour les intervenants en situation de crise est lourde et exigeante. Ils doivent repousser l’échéance du passage à l’acte tout en concevant un plan de traitement, reconnaître les intentions de la personne en crise et discerner tous les éléments (tels que les abus d’alcool, de drogue, de médicaments, les tentatives de suicide antérieures, les antécédents psychiatriques ainsi que les problèmes de santé mentale existant dans la famille) qui augmentent le risque suicidaire.

Pour déterminer les priorités de l’intervention il convient de procéder assez rapidement à l’évaluation de l’urgence, c’est à dire à l’évaluation de la probabilité d’un passage à l’acte.

Au cours de cette évaluation, l’intervenant doit nécessairement prendre en considération la létalité du scénario en questionnant la personne suicidaire sur ses intentions et sur les moyens qu’elle pense utiliser au moment du passage à l’acte.

Les questions directes quant au scénario suicidaire (où, quand, comment) peuvent sembler embarrassantes à poser, elles peuvent mettre celui qui intervient dans la gêne, parce qu’il n’est pas concevable dans notre culture d’oser aborder de telles questions. Il faut donc aller au delà de l’indisposition que ces questions peuvent susciter et se rappeler qu »elles peuvent être réconfortantes et apaisantes pour une personne suicidaire d’être considérée dans ce qu’elle vit actuellement et dans son désir de mourir. La personne suicidaire interprète les questions directes de l’intervenant comme une compréhension de sa souffrance.
Lorsque les questions sont précises, il y a plus de chance que les réponses le soient aussi.

Évaluation de la dangerosité et de l’urgence
Conférence de consensus 2000
Il  est souhaitable d’explorer six éléments.
1. Le niveau de souffrance
– désarroi ou désespoir ;
– repli sur soi, isolement relationnel ;
– sentiment de dévalorisation ou d’impuissance ;
– sentiment de culpabilité.
2. Le degré d’intentionnalité
– idées envahissantes, rumination ;
– recherche ou non d’aide, attitude par rapport à des propositions de soins ;
– dispositions envisagées ou prises en vue d’un passage à l’acte (plan, scénario).
3. Les éléments d’impulsivité
– tension psychique, instabilité comportementale ;
– agitation motrice, état de panique ;
– antécédents de passage à l’acte, de fugue ou d’actes violents.
4. Un éventuel élément précipitant : conflit,  échec, rupture, perte, etc.
5. La présence de moyens létaux à disposition : armes, médicaments, etc.
6. La qualité du soutien de l’entourage proche : capacité de soutien ou inversement renforcement du risque dans le cas de familles « à transaction suicidaire ou mortifère ».
La conférence de consensus 2000  recommande de considérer comme en urgence faible  une personne qui :
– désire parler et est à la recherche de communication ;
– cherche des solutions à ses problèmes ;
– pense au suicide mais n’a pas de scénario suicidaire précis ;
– pense encore à des moyens et à des stratégies pour faire face à la crise ;
– n’est pas anormalement troublée mais psychologiquement souffrante ;
– a établi un lien de confiance avec un praticien.
On  considère comme en urgence moyenne une personne qui :
– a un équilibre émotionnel fragile ;
– envisage le suicide et son intention est claire ;
– a envisagé un scénario suicidaire mais dont l’exécution est reportée ;
– ne voit de recours autre que le suicide pour cesser de souffrir ;
– a besoin d’aide et exprime directement ou indirectement son désarroi.
On considère comme en urgence élevée une personne qui :
– est décidée : sa planification est claire et le passage à l’acte est prévu pour les jours qui viennent ;
– est coupée de ses émotions: elle rationalise sa décision ou, au contraire, elle est très émotive, agitée ou troublée ;
– se sent complètement immobilisée par la dépression ou, au contraire, se trouve dans un état de grande agitation ;
– dont la douleur et l’expression de la souffrance sont omniprésentes ou complètement tues ;
– a un accès direct et immédiat à un moyen de se suicider : médicaments, armes à feu, etc. ;
– a le sentiment d’avoir tout fait et tout essayé ;
– est très isolée.
Il faudra également tenir compte de l’élément de dangerosité lié à l’accumulation de facteurs de risque